Le Réseau, qui réunit des centres de Gipuzkoa, d’Aragon, de Catalogne en Espagne, et des Hautes-Pyrénées, de Haute-Garonne et d’Ariège en France, a réalisé sa première conférence de presse transfrontalière en ligne, durant laquelle ont été abordées des questions comme l’importance sociale et l’impact positif de ces espaces culturels pour le territoire pyrénéen, en particulier durant cette période exceptionnelle.
Parmi les actions réalisées de manière collaborative pendant la pandémie, l’une des plus visibles est l’exposition “Quand le monde a commencé… Mythes et légendes des Pyrénées”, qui marie supports physiques et contenus digitaux et qui montre la richesse et la diversité du patrimoine oral des vallées des deux versants de la chaîne de montagne.
Ont participé à cette rencontre avec la presse: Denis Puech, vice-président de la Communauté de Communes Couserans-Pyrénées délégué à la Culture (Ariège); Pauline Chaboussou, directrice du Patrimoine de la Communauté de Communes Couserans-Pyrénées (Ariège); Jordi Abella, directeur de l’Ecomuseu de les Valls d’Àneu (Lleida); José Luis Gallego, responsable du projet Patrim+ à Ayerbe (Huesca) et Kizkitza Ugarteburu, coordinatrice du Caserío-Museo Igartubeiti (Ezkio, Gipuzkoa), ainsi qu’Iñaki Arrieta, docteur en anthropologie sociale et culturelle et professeur de l’Université du Pays Basque/Euskal Herriko Unibertsitea.
Indispensable pour le futur des zones de montagne, pour lutter contre la désertification, en toute sécurité sanitaire, avec la capacité d’innover à partir des ressources disponibles, d’utiliser le numérique et de chercher de nouveaux moyens de communication et de travail commun en dépassant les frontières: ce sont les conclusions positives que retirent de l’expérience PATRIM+ (Interreg POCTEFA) durant la pandémie les centres du réseau transfrontalier de sites culturels, patrimoniaux et naturels, qui ont constaté comment le public a réagi aux initiatives comme celles qui ont sorti le musée dans la nature ou intégré le virtuel au patrimoine et au territoire, dans une situation aussi exceptionnelle que celle que nous traversons.
Denis Puech, vice-président de la Communauté de Communes Couserans-Pyrénées délégué à la Culture (Ariège), a ouvert la rencontre et expliqué que le projet PATRIM+ comptait 11 partenaires, en majeure partie des centres de patrimoine et de culture de la zone pyrénéenne, ainsi que deux universités et une entreprise de gestion culturelle.
Il s’agit d’une initiative qui se développe dans le cadre du programme Interreg POCTEFA, cofinancée à hauteur de 65% par le Fonds Européen de Développement Régional (FEDER). Denis Puech a souligné que “dans un secteur qui a tant souffert de la pandémie comme celui de la culture”, la coopération au sein de ce réseau européen a été un levier pour “pouvoir s’adapter et se réinventer” en parvenant à “ne pas s’arrêter et à continuer à générer activité et réflexion”.
Le réseau PATRIM est formé de ces sites muséaux et universités situés dans les zones pyrénéennes de la Gipuzkoa, de l’Aragon, de la Catalogne, des Hautes-Pyrénées, de l’Ariège et de la Haute-Garonne:
Château de Seix – Patrimoine du Couserans (Communauté de Communes Couserans-Pyrénées, Ariège)
Ecomuseu dels Valls d’Àneu (Lleida, Catalogne)
Centro Santiago Ramon y Cajal (Ayuntamiento de Ayerbe, Aragon)
Musée Larrey (Commune de Beaudéan, Hautes-Pyrénées)
Parque Cultural del Río Vero – Centro del arte rupestre (Comarca del Somontano de Barbastro, Aragon)
Musée de l’Aurignacien (Aurignac, Haute-Garonne)
Espacio Pirineos – Centro de Creación y Cultura del Pirineo, (Ayuntamiento de Graus)
Ferme-Musée Igartubeitiu Baserria (Ezkio, Gipuzkoa)
Espacio Salto de Roldan (Nueno, Comarca Hoya de Huesca/Plana de Uesca, Aragon)
Universidad del País Vasco / Euskal Herriko Unibertsitatea (Donostia/San Sebastian)
Espai Origens – Centre d’Estudis del Patrimoni Arqueològic de la Prehistòria, Universitat Autònoma de Barcelona (Camarasa, Lleida, Catalogne)
Malgré les confinements et la situation variable dans les différents territoires, 10 sites du réseau ont réussi à concevoir “exclusivement en télétravail durant le premier confinement de 2020” une exposition adaptée aux protocoles Covid-19. Elle combine supports physiques et contenus numériques et est pensée pour être itinérante, comme l’a expliqué Pauline Chaboussou, directrice du patrimoine et du Château de Seix, centre de culture et de patrimoine de la Communauté de Communes Couserans-Pyrénées en Ariège, France, qui a coordonné cette proposition qui porte le nom “Quand le monde a commencé… Mythes et légendes des Pyrénées”.
“Les mythes sont importants car ils font partie de nous. Les relations de la terre avec l’inconnu, l’inexploré, l’incompréhensible, ont été expliquées à travers des savoirs et croyances qui, d’une certaine manière, avaient pour but de rendre plus habitable la réalité”, a assuré Pauline Chaboussou. Réalisée en 4 langues – français, castillan, euskera et catalan – l’exposition “montre la richesse et la diversité du patrimoine oral conservé dans les vallées des deux côtés de la chaîne et en même temps l’incontestable unité culturelle des Pyrénées”.
L’édition d’un livre reprenant les contenus à l’été 2021 viendra prolonger cette exposition.
De même, cet élément poétique et évocateur commun qui unit les différentes régions des Pyrénées se reflète dans la vidéo du projet qui a également été enregistrée au milieu de la pandémie, dans le respect des conditions sanitaires de chaque territoire.
Elle est disponible dans les quatre langues du projet sur sa chaîne YouTube: https://www.youtube.com/channel/UCwHvEfQc4QNBEfTYPCmuHSw
Le succès de la journée d’étude «Ces Pyrénéennes qui ont déplacé des montagnes»
Une autre initiative de Patrim+ qui donnera lieu également à une publication. Le Musée Larrey de Beaudéan (Hautes-Pyrénées, France) a organisé avec le soutien de la Communauté de Communes Couserans-Pyrénées une journée d’étude dans le cadre du projet européen PATRIM+ (Interreg POCTEFA) sur des femmes d’exception “de la Préhistoire à nos jours”.
L’initiative, transformée en rencontre en ligne, a permis de valoriser la perspective de genre et l’importance du rôle des femmes dans le monde pyrénéen, qui n’est pas vraiment reflétée dans le récit historique traditionnel. “Souvent méconnues, oubliées, occultées car leurs opinions, leurs actions, leur mode de vie ne correspondaient pas à la place imposée aux femmes à leur époque, ces Pyrénéennes auraient dû marquer l’Histoire”.
Les communications de cette journée, étoffées par des recherches supplémentaires, donneront lieu à une publication en fin d’année 2021.
De l’importance de travailler en réseau
“Il ne fait aucun doute que le travail en réseau a été d’une grande aide dans cette pandémie”, a ajouté Jordi Abella, responsable de l’Ecomuseu de les valls d’Àneu à Esterri d’Àneu, province de Lleida (Catalogne). “Grâce à PATRIM, nous avons pu améliorer la communication au niveau local et toucher un public plus large”.
“Nous avons beaucoup réfléchi et appris sur la fonction sociale des musées et sur la manière dont les réseaux constituent un outil de base pour la survie et l’avenir des Pyrénées”, a souligné Jordi Abella. “Je pense que les musées se sont avérés être des espaces sûrs”. Il est significatif, par exemple, que même avec “les restrictions de jaugeage pendant l’été 2020, nous ayons eu 20% de visiteurs de plus que l’été précédent”, a-t-il assuré.
Cela est dû à une augmentation du tourisme local dans les Pyrénées, à une découverte et à une revalorisation du patrimoine de proximité, souvent méconnu, et à la créativité lorsqu’il s’est agi de proposer des activités de plein air. S’ajoute aussi le fait de se concentrer stratégiquement sur “un public familial”.
Pour le Caserio Museo Igartubeiti (Ferme-musée) situé à Ezkio en Gipuzkoa (Pays basque), le défi a été aussi d’approfondir la relation entre art, culture et population locale. “Pendant que le musée était fermé, nous avons programmé des initiatives telles que des conférences et des podcasts sur les baserritarras [agriculteurs.trices] face au coronavirus ou bien Savourez le Musée, qui combinait gastronomie multiculturelle et patrimoine”. Pour la réouverture, “nous avons incorporé des codes QR afin que les visiteurs puissent accéder aux contenus en évitant tout contact physique”, a expliqué Kizkitza Ugarteburu, coordinatrice du Caserio Museo Igartubeiti.
Les clés de la réouverture impliquent également une réflexion importante sur le rôle de l’exposition et des espaces culturels. C’est ainsi que les partenaires ont travaillé sur différents aspects tels que le Musée en tant qu’“espace sûr”, “en expansion, sortant sa programmation et ses activités dans l’espace public”. Ils ont également opté pour le “micromusée” proposant “de grandes histoires en quelques mots et pour des petits groupes”. Ils se sont également plongés dans le musée hybride, à la fois en présentiel mais aussi en ligne et connectés. Il s’agit de “renforcer les réseaux avec l’environnement local. Et aussi d’explorer et ouvrir de nouveaux réseaux au-delà du local, à la fois national et international”.
Produit, patrimoine et territoire
De son côté, José Luis Gallego, responsable du projet Patrim+ à Ayerbe (région de Huesca, Aragon), a évoqué le lancement d’une initiative de dynamisation “Produit, patrimoine et territoire”. Il s’agit “d’une sélection de produits locaux issus de comarcas et de départements du périmètre du Réseau PATRIM, qui se distinguent par leur qualité, leur authenticité et leur responsabilité vis-à-vis de la durabilité culturelle et environnementale, comme vitrine d’un héritage et opportunité de développement local”, a-t-il expliqué. Ainsi, le concept de patrimoine est-il élargi et englobe-t-il des domaines tels que la gastronomie, la musique ou les savoirs immatériels.
Le Centre d’interprétation Ramón y Cajal de Ayerbe met déjà en place cette démarche en collaboration avec la comarca de la Hoya de Huesca.
En outre, José Luis Gallego a annoncé que Patrim travaillait pour devenir un Groupement Européen de Coopération Territoriale stable pouvant opérer au niveau communautaire.
Conception et édition du manuel “Patrimoine et musées locaux : clés de gestion”
Un bon exemple de la collaboration entre le domaine académique et les centres sur le terrain est le manuel “Patrimoine et musées locaux : clés de gestion”, fruit du projet Patrim+. Comme l’a expliqué Iñaki Arrieta, docteur en anthropologie sociale et culturelle et professeur de l’Université du Pays Basque/Euskal Herriko Unibertsitea, cette initiative vise à ce que “la connaissance se répercute dans le territoire” et son objectif est de contribuer à renforcer les compétences des personnels des centres qui, étant “plus petits et locaux”, ne sont souvent pas abordés dans les études universitaires malgré leur importance sur le terrain.